Dans le cadre du programme LIFE « Conservation de la moule perlière d’eau douce du Massif armoricain » (ou LIFE « mulette »), six populations sont mises en élevages pour leur sauvegarde génétique et leur renforcement dans les différents cours d’eau. En Bretagne, trois cours d’eau sont concernés : l’Elez, le Loc’h et le Bonne Chère. En Basse-Normandie il s’agit des populations du Sarthon, de l’Airou et de la Rouvre.
La station d’élevage de mulettes perlières située sur la pisciculture du Favot à Brasparts, dans le centre du Finistère, est désormais entièrement opérationnelle. Le bâtiment, d’environ 300 m², est équipé d’une salle de réunion, d’un laboratoire (permettant d’effectuer les activités de contrôle des branchies, tris des mulettes, observations et comptages sous loupe binoculaire, préparation des rations…), de deux salles d’élevage de mulettes, d’une salle de production d’algues et d’une salle destinée à la mise en quarantaine des souches bas-normandes.
Vérification de la maturité et collecte des larves
Sur le terrain, les différentes populations d’adultes sont surveillées par les techniciens de Bretagne Vivante pendant la saison de ponte. A l’aide d’une pince permettant d’entrouvrir légèrement les mulettes (nécessitant les autorisations adéquates), un contrôle des géniteurs est effectué afin de déterminer les individus maturants. Ces derniers sont alors suivis pendant plusieurs semaines jusqu’au jour où les glochidies atteignent leur dernier stade d’évolution. Les larves sont alors collectées au bord du cours d’eau avant d’être transportées à la station d’élevage, les adultes étant replacés dans la rivière après avoir été marqués.
Mises en contact à la station
Une fois à la station, chaque échantillon de glochidie est contrôlé afin de vérifier leur aptitude à l’enkystement. Pour cela, un grain de sel est déposé sur une goutte d’eau contenant des larves sous microscope. Si les larves se ferment instantanément, ces dernières sont alors viables et pourront permettre une infestation. La quantité totale de glochidies est estimée en effectuant le comptage de différents échantillons.
Pour la mise en contact, nous utilisons 1 poisson-hôte pour 1 000 glochidies. Les poissons (truite fario) préalablement mis à jeun sont placés dans une cuve adaptée à la quantité de poissons en prenant garde de ne pas les stresser afin d’éviter les hypersécrétions de mucus pouvant perturber l’infestation. Tout produit ou élément extérieur comme les gouttes de sueur est proscrit. Un brassage ainsi qu’un apport d’oxygène est mis en place afin de conserver les larves en suspension et de maintenir le taux d’oxygène dissous sachant qu’il n’y a pas de renouvellement d’eau pendant la manipulation. La mise en contact dure entre une demi-heure et une heure. Quelques poissons sont alors sacrifiés afin de contrôler le succès de l’infestation après prélèvement de branchies.
Mise en élevage
Des auges habituellement utilisées pour l’élevage de salmonidés ont été recyclées pour la mise en culture des mulettes perlière.
Ces systèmes d’une capacité de 100 à 200 L ont été modifiés afin de créer des circuits fermés qui reproduisent « un mini cours d’eau artificiel ». Une grille fine a été placée sur l’extrémité de l’auge afin de retenir le lit de sable de 2-3 cm d’épaisseur. Une pompe d’aquarium est placée derrière cette grille afin de permettre une circulation permanente de l’eau. Un apport de nourriture journalier est réalisé (1 mL de « Shellfish diet 1 800 » et 1 mL de « Nano 3 600 »). Après divers essais de concentrations il semblerait que le nombre de 5 000 à 10 000 mulettes soit optimal pour la première année d’élevage.
Résultats en 2014
Plusieurs dizaines de milliers de mulettes ont pu déjà être élevées dans la station d’élevage de Brasparts. Les souches bretonnes sont élevées depuis 2012, 3 cohortes se trouvant aujourd’hui à la station. En 2011, la mise en quarantaine imposée par les services vétérinaires concernant les souches bas-normandes a empêché la collecte de glochidies des cours d’eau concernés (et donc la collecte des jeunes moules en 2012). En 2012, la montée des niveaux d’eau en région Basse-Normandie ayant empêché la poursuite des suivis de gravidité, la collecte des larves a été compromise (ainsi que la collecte des jeunes moules en 2013). C’est seulement en 2013 que nous avons pu récolter pour la première fois les larves de l’Airou et du Sarthon et en 2014 la totalité des larves des populations bas-normandes. Nous aurons donc en 2015 la totalité des souches bas-normandes en élevage